Patriam  Recuperare  et  Albert  Kirchmeyer             

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Il est difficile d'évaluer le nombre de personnes qui eurent une action au sein de Patriam Recuperare. Des règles de coupure entre les agents faisaient souvent qu'ils ne pouvaient pas se connaître. Certains étaient en lien avec d'autres réseaux ou mouvements et ils eurent à choisir après-guerre à quel groupement s'affilier pour faire valoir leurs droits soit auprès de la Résistance Intérieure Française soit aux Forces Françaises Combattantes. Beaucoup de ceux qui agirent pour Patriam Recuperare, choisirent finalement un autre réseau à l'heure où Patriam Recuperare n'était pas encore homologué : notamment le réseau Vélite-Thermopyles auquel Albert Kirchmeyer lui-même appartenait ou encore le réseau Frédéric fondé par Henri Manhès. Il faut noter aussi que des résistants ne s'affilièrent nulle part.

Les attestations d'appartenance délivrées par les chefs des réseaux et mouvements de Résistance (ou par leurs liquidateurs) identifiaient l'agent, résumaient brièvement son parcours, ses actions menées, informant parfois sur les liens à d'autres agents. Ces attestations permettent de reconstituer un peu une organisation des actions. 

Mais elles sont souvent très incomplètes, voire vagues, peut-être parfois complaisantes. 

Malgré tout, on peut estimer à environ 300 les personnes actives pour Patriam Recuperare, de manière occasionnelle ou permanente, dans plusieurs régions.


Agir c'était servir de boîte aux lettres, passer des documents, abriter quelque temps une personne recherchée, distribuer des tracts ou des journaux clandestins, c'était faire du renseignement, collecter des informations susceptibles de contribuer à la défaite de l'ennemi, les faire parvenir à Londres, c'était aussi saboter et gêner l'occupant, c'était faire passer en zone libre ou à l'étranger ceux qui devaient fuir, leurs fournir de faux papiers. Patriam Recuperare a été surtout un service de renseignement, organisa aussi une filière d'évasion. Un journal clandestin fut édité nommé La Nouvelle République.

On trouve un mélange socio-culturel et professionnel au sein de Patriam Recuperare mais les médecins sont nombreux, des scientifiques, chercheurs furent actifs comme d'autres fonctionnaires démissionnés par Vichy. On trouve également des élus, maires, députés, anciens ministres.

Il faut souligner l'importance des résistants policiers, inspecteurs, commissaires, en poste à la SNCF ou employés de la préfecture de police de Paris, toute une filière qui compta beaucoup dans l'histoire de ce mouvement de Résistance, notamment celle de L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité).

Notons aussi un réseau d'enseignants solidaires de la Normandie jusqu'au sud de la France et une brigade de sapeurs-pompiers actifs à Paris.



Le mouvement Patriam Recuperare compte a priori peu de femmes engagées individuellement mais en réalité les femmes participent souvent, en tant qu'épouses ou mères ou filles. La Résistance est aussi une histoire de famille.

Patriam Recuperare a tissé son réseau du nord (zone occupée) au sud (zone "nono"). Il y a des regroupements géographiques significatifs :


  • Paris : La plupart des agents de PR sont domiciliés ou travaillent à Paris et ces adresses sont souvent des lieux de réunion, des boîtes aux lettres, des refuges... Le siège de Patriam Recuperare est l'adresse personnelle d'Albert Kirchmeyer, 123 rue Saint-Antoine. Autour de cette adresse, des cafés servent de lieux de rencontres et d'échanges de renseignements comme le Canon de la Bastille, ou -Place du Châtelet- le Zimmer et Le Dreher où ont lieu des arrestations en 1943. D'autres lieux comme l'hôpital Sainte-Anne, l'Institut Fournier accueillent des réunions de scientifiques impliqués dans La Ligue, Le Cercle ou le Comité d'Action Maçonnique. Un service de l'Hôtel-Dieu épargne quelques réfugiés appelés au STO. A Paris aussi, une brigade de sapeurs-pompiers, au nom de Patriam Recuperare, gêne l'occupant. L'histoire de Patriam Recuperare est aussi celle de la Gare de Lyon et celle de la Préfecture de Police de Paris infiltrée par la Résistance.
  • Bourg-La-Reine : un groupe de Bourg-la-Reine participe à la filière d'évasion aidant des étudiants et des enseignants, des jeunes échappant au STO, de la région de Rouen et Caen et de la Région Parisienne, à partir vers l'Espagne, via Tarbes puis Dax (grâce à la Société Nationale des Pétroles d'Aquitaine), les Pyrénées. Ceux de Bourg-La-Reine travaillent aussi pour L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité), La Ligue, Le Cercle.
  • Levallois-Perret et Villeneuve-Saint-Georges : sont avec Paris et Bourg-La-Reine, les villes d'origine de Liberté-Egalité-Fraternité. Albert Kirchmeyer avait vécu longtemps à Levallois-Perret avant de s'installer à Paris, il y retrouvait sa Loge. Le groupe Liberté s'origine à Levallois-Perret et Villeneuve-Saint-Georges.
  • Saint-Germain-En-Laye : un petit groupe actif à Saint-Germain-En-Laye est en liaison avec L.E.F. (Liberté-Egalité-Fraternité) et intègrera finalement le réseau Ceux de La Libération.
  • Montrouge : plusieurs résistants de Montrouge participent avec d'autres à la fabrication du journal clandestin de Patriam Recuperare : "La Nouvelle République".
  • Châteaudun : l'usine Paulstra de Châteaudun est impliquée dans l'action de Patriam Recuperare.
  • Grâce aux agents de liaison, des liens et des relais sont assurés avec des résistants et d'autres réseaux ou mouvements en province, comme BordeauxLyon, Montpellier, Nice, Toulouse. Certains se chargent du passage de la ligne de démarcation.